En Belgique, les locations de biens immeubles sont en principe exonérées de la TVA, sous réserve d’un certain nombre d’exceptions (leasing immobilier, emplacements de parking, etc.). Cela signifie que les propriétaires-bailleurs ne peuvent donc pas déduire la TVA supportée sur la construction ou l’achat des immeubles qu’ils mettent en location, et ce, même dans une relation B2B.
En mars dernier, le gouvernement est parvenu à un accord de principe concernant l’introduction d’un régime optionnel de la TVA. Après l’avis du Conseil d’Etat, les projets de texte ont été modifiés sur plusieurs points importants avant que le parlement ne donne finalement son accord sur le projet de loi. Grâce à ces nouvelles règles entrées en vigueur depuis le 1er janvier 2019, les locations « professionnelles » de biens immobiliers peuvent désormais, sous certaines conditions, être soumises à la TVA.
Un système optionnel et non obligatoire
Yannick Woltèche, avocat au Barreau du Brabant Wallon, examine dans le détail pour Fiscal Team ce que vous devez savoir sur la taxation TVA optionnelle de la location immobilière professionnelle.
Contexte professionnel (B2B)
Cette option sera possible si le preneur est un assujetti qui utilise le bien loué exclusivement dans le cadre de son activité économique qui lui donne sa qualité d’assujetti.
Il importe peu que le preneur soit un assujetti avec droit à déduction intégral, un assujetti mixte (ex. banque) ou un assujetti exempté (ex. maison de repos). Par contre, l’option n’est pas applicable si le bâtiment (ou la fraction de bâtiment) est donné en location à un preneur n’ayant pas la qualité d’assujetti.
Bâtiments construits à partir du 1er octobre 2018
Ce nouveau régime ne sera applicable qu’aux contrats de location qui concernent des nouveaux bâtiments (ou des bâtiments devenus neufs suite à des rénovations) pour lesquels aucune TVA sur des travaux immobiliers matériels n’est devenue exigible avant le 1er octobre 2018.
Ceci exclut donc les projets de construction pour lesquels une facture d’acompte aurait été délivrée, rendant la TVA exigible avant cette date. Par contre, les prestations intellectuelles (ex. architecte, géomètre, etc.), les travaux de démolition, ou encore les travaux relatifs au sol (ex. sondage, terrassement, etc.) ne doivent pas être pris en compte. Le fait que la TVA sur ces services soit devenue exigible avant le 1er octobre 2018 n’a donc pas d’incidence sur l’application du système optionnel.
Fraction de bâtiment
La location peut avoir pour objet des fractions de bâtiments, pour autant qu’elles puissent être exploitées de façon autonome et que l’on puisse y accéder directement depuis l’extérieur.
A noter que l’option pourra être exercée par contrat de location ; il sera donc possible de donner en location une fraction d’un bâtiment sans TVA et une autre fraction du même bâtiment avec TVA (à charge pour le propriétaire-bailleur de déterminer correctement son prorata de déduction de la TVA supportée en amont sur le bâtiment en question).
Option conjointe du propriétaire-bailleur et du preneur
L’option pourra être exercée au moyen d’une déclaration pro fisco dans le contrat de bail et vaudra pour toute la durée du contrat de location.
Base minimale d’imposition
Afin d’éviter des éventuels abus, une base minimale d’imposition sera applicable dans la situation où le propriétaire-bailleur et le preneur sont liés sur les plans personnels, financiers ou organisationnels et que le preneur ne dispose pas d’un droit à déduction intégral ; dans ce cas, la TVA sera due sur le loyer de marché pour une location dans des conditions similaires.
Quel taux ?
La location immobilière pour laquelle l’option est exercée, sera en principe soumise au taux normal de 21%. Cela étant dit, conformément à ce qui existe déjà actuellement pour le leasing, les taux réduits (6% ou 12%) prévus pour les établissements pour handicapés, bâtiments scolaires, logements dans le cadre de la politique sociale (ex. maisons de repos) seront applicables.
Période de révision de la TVA étendue à 25 ans
Dans l’hypothèse où les conditions de taxation prévue par le système optionnel ne sont plus remplies (ex. le bâtiment n’est plus utilisé dans le cadre de l’activité économique du preneur), le propriétaire-bailleur sera tenu de procéder à une révision de la TVA déduite en amont sur la construction ou l’acquisition du bâtiment, et ce, sur une période de 25 ans.
Un arrêté royal doit encore déterminer certaine règles quant à la révision à opérer dans des situations spécifiques, par exemple en cas de cession totale ou partielle du bâtiment loué
Location immobilière de courte durée
La location immobilière pour une période qui ne dépasse pas 6 mois (ex. salles de séminaire ou espaces destinés à accueillir un événement, etc.) sera obligatoirement soumise à la TVA.
En cas de contrats de courte durée successifs (avec reconduction volontaire ou automatique), c’est la durée totale continue d’utilisation du bien qui sera prise en compte.
Ce nouveau régime de taxation ne trouvera toutefois pas à s’appliquer dans les situations suivantes :
- location à des fins de logement (résidence principale ou secondaire, etc.) ;
- location à des personnes physiques agissant à des fins privées ;
- mise à disposition à des organisations sans but lucratif ; et
- location à des organismes exerçant des activités socio-culturelles
Il appartient au propriétaire-bailleur de prouver que le preneur fait partie de l’une des catégories susmentionnées et que la location peut donc s’effectuer en exonération de TVA.
Mise à disposition d’emplacements pour l’entreposage de biens
L’exception à l’exemption pour la location immobilière qui existe actuellement pour la mise à disposition d’emplacements pour l’entreposage des biens est profondément réformée.
A partir du 1er janvier 2019, il sera question de « mise à disposition d’emplacements pour l’entreposage de biens » lorsque plus de 50% de la surface ou du volume du bâtiment est utilisé pour l’entreposage de biens et que la surface ou le volume utilisable restant n’est pas utilisé pour plus de 10% à titre de surface commerciale.
Une location B2C qui répond à cette nouvelle définition sera d’office taxée.
Pour les locations B2B, plusieurs hypothèses doivent être envisagées :
- Pour les contrats en cours qui sont soumis à la TVA, rien ne change ; ces contrats resteront soumis à la TVA jusqu’au terme initial du contrat
- Pour les contrats en cours qui n’étaient pas soumis à la TVA et pour les nouveaux contrats conclus après le 1er janvier 2019, portant sur des bâtiments qui répondent à la nouvelle définition, les parties pourront opter pour l’application de la TVA ; à noter qu’il n’est pas exigé ici que le bâtiment soit construit à partir du 1er octobre 2018 (l’option pourra donc également s’appliquer aux bâtiments construits avant cette date)
L’équipe de Fiscal Team possède une vaste expérience en matière de législation et de fiscalité immmobilière. Vous avez des questions par rapport à cette réforme ou vous souhaitez creuser davantage certaines conditions de ce système ? A votre demande, Fiscal Team répond à vos questions et vous conseille dans le détail par rapport à ce nouveau régime optionnel.