En tant qu’indépendant ou dirigeant d’entreprise vous avez bénéficié ou bénéficiez toujours des mesures de soutien instaurées pendant la crise. Et vous vous demandez peut-être comment les différentes aides corona accordées par les autorités seront taxées selon le type de droit passerelle. Examinons ensemble les réponses, parfois complexes, à ces questions…

Si le paysage semble s’éclaircir sur le front de la pandémie, nombreux sont ceux qui ont bénéficié ou qui bénéficient toujours des aides accordées par les autorités. Sur base des informations fournies par le quotidien L’Écho, Fiscal Team fait volontiers le point avec vous quant à la fiscalité d’application sur les différents droits passerelles.

Quelles sont les différentes formules existantes ?

Commençons par un petit rappel des différents droits passerelles :

Le droit passerelle “classique”

On l’oublie souvent, mais, avant même la crise du coronavirus, les indépendants pouvaient déjà recourir au droit passerelle s’ils étaient contraints de cesser leurs activités à la suite d’une catastrophe naturelle (inondation, tremblement de terre…), d’un incendie, de difficultés économiques ou s’ils étaient déclarés en faillite. L’indépendant reçoit alors une prestation mensuelle, équivalente à la pension minimale pour indépendants.

Concrètement, un isolé a droit à une allocation de 1.291,69 euros par mois pendant un maximum de 12 mois (ou 24, dans certains cas précis) sur l’ensemble de sa carrière professionnelle. Pour un travailleur indépendant avec charge de famille, ce montant passe à 1.614,10 euros.

Le droit passerelle “de crise” pour indépendants

Depuis le 1er mars 2020, le droit passerelle de crise est accordé aux indépendants qui ont été forcés d’interrompre (partiellement ou totalement) leur activité ou ont connu une réduction importante de celle-ci  parce qu’ils dépendaient en grande partie d’entreprises qui ont été contraintes à la fermeture.

Le montant du droit passerelle est ici identique à celui du droit passerelle classique. Depuis le 1er octobre 2020, ces montants ont été doublés pour ceux qui ont été contraints d’interrompre complètement leur activité en raison des mesures adoptées par les autorités ou de leur niveau élevé de dépendance. C’est le cas notamment des établissements horeca, des traiteurs, des discothèques, des forains… La mesure a été prolongée jusqu’au 30 septembre 2021, mais sous une nouvelle forme.

Droit passerelle de redémarrage ou indemnité de relance pour indépendants

Fin juin 2020, les autorités ont permis aux indépendants qui avaient été contraints d’interrompre, même temporairement, leur activité de bénéficier du droit passerelle de soutien à la reprise.

Ce ballon d’oxygène spécifique s’adressait entre autres aux commerces non alimentaires, coiffeurs et agences de voyages. La condition étant que ces commerces devaient avoir connu une baisse de leur chiffre d’affaires ou une diminution de leurs commandes d’au moins 10% par rapport au même trimestre de 2019. Les demandes pour l’obtention de ce droit sont recevables jusqu’au 30 juin 2021 (pour les mois d’octobre, novembre et décembre 2020).

Les montants octroyés sont les mêmes que pour le droit passerelle ordinaire. Tant les travailleurs indépendants à titre principal que les indépendants à titre complémentaire sont éligibles à ces indemnités.

Comment sont imposées ces différents droits passerelles ?

Droit passerelle “classique”

Le droit passerelle classique est repris dans le calcul classique de l’impôt. Ces indemnités, considérées comme des “revenus de remplacement”, sont imposées globalement aux tarifs progressifs normaux (de 25 à 50 %). Et ce indépendamment de la qualité du bénéficiaire.

Droit passerelle “de crise”

Le revenu de remplacement étant perçu à titre personnel, il émarge à l’IPP. L’imposition du droit passerelle de crise dépend du régime fiscal des activités normalement exercées.

  • Pour les indépendants et les professions libérales :

Le droit passerelle est imposable distinctement à un taux préférentiel dérogatoire de 16,5 % à la condition que ces indemnités (combinées à d’autres prestations éventuelles octroyées en compensation d’une réduction de l’activité professionnelle) ne dépassent pas les bénéfices ou profits nets imposables globalement des quatre dernières années de revenus (en principe 2016-2019).

Attention, la partie de l’indemnité qui excèderait ce revenu de référence serait imposable aux taux progressifs normaux (de 25 à 50 %).

Exemple :

Vos bénéfices nets en 2016 : 9 500 euros

Vos bénéfices nets en 2017 : 6 500 euros

Vos bénéfices nets en 2018 : 2 000 euros (perte)

Vos bénéfices nets en 2019 : 14 000 euros

Total pour les quatre dernières années de référence : 32.000 euros

Si le montant total des indemnités octroyées dans le cadre du ‘droit passerelle de crise’ est inférieur à 32.000 euros, le taux préférentiel de 16,5% reste d’application.

  • Pour les dirigeants d’entreprise indépendants ou les aidants indépendants :

Le taux préférentiel ne s’applique pas aux dirigeants d’entreprise indépendants ou aux travailleurs agissant en tant qu’aidants indépendants. Les droits passerelles perçus restent donc malheureusement imposables aux taux progressifs habituels (entre 25 et 50 %, plus les centimes additionnels communaux). Ceci parce que l’aide est considérée comme une “indemnité obtenue en réparation totale ou partielle d’une perte temporaire de rémunérations de dirigeants d’entreprise”.

Toutefois, vous pouvez bénéficier d’une réduction d’impôt pour revenus de remplacement. Ce montant s’élève à un maximum de 1.828,41 euros.

  • Pour les conjoints aidants :

Les prestations octroyées dans le cadre du droit passerelle de crise aux conjoints aidants, même s’ils sont rémunérés, ne sont pas imposées.

Droit passerelle de redémarrage ou indemnité de relance 

La fiscalité applicable au ‘droit passerelle de redémarrage ou indemnité de relance’ est nettement moins favorable. Pour les professions libérales, les indépendants, les dirigeants d’entreprise indépendants et les aidants indépendants, les prestations octroyées dans le cadre du droit passerelle de soutien à la reprise sont imposées au taux progressifs normaux.

Une réduction d’impôt, plafonnée à 1.828,41 euros, peut s’appliquer pour les revenus de remplacement. Les prestations octroyées aux conjoints aidants ne sont pas imposées.

Les dirigeants d’entreprise indépendants seront les plus mal lotis

Conclusion, ce sont les indépendants dirigeant une entreprise et ayant bénéficié des droits passerelles qui seront les plus lourdement taxés, le prélèvement pouvant aller dans certains cas, jusqu’à 50 % !

Et les aides régionales et locales ?

Les Régions, Communautés, provinces et communes ont également soutenu les entreprises et les indépendants.

En Région wallonne, une indemnité compensatoire unique a été octroyée en fonction des secteurs. L’horeca, les hébergements, les agences de voyages et les activités connexes ont bénéficié d’une  indemnité de 5.000 euros ou de 2.500 euros (indemnité partielle).

En Région de Bruxelles-Capitale, les entreprises actives dans les mêmes secteurs et contraintes à la fermeture ont eu droit à une prime unique de 4.000 euros.

Ces indemnités échappent à l’imposition et ne doivent pas être reprises dans votre déclaration d’impôt.

Et le congé parental corona ?

Certains travailleurs indépendants et salariés, qui ont réduit leurs activités au cours de la période allant de mai à fin septembre 2020 afin de s’occuper de leurs enfants, ont pu bénéficier d’un congé parental corona temporaire.

Cette indemnité doit être reprise dans votre déclaration d’impôt et est imposée comme un revenu de remplacement – indépendamment de la qualité du bénéficiaire – aux tarifs d’imposition progressifs ordinaires (de 25 à 50%, plus les centimes additionnels communaux).