L’époque où certains durcissaient à l’extrême leurs conditions générales de vente pour les rendre les plus contraignantes possibles pour l’autre partie, est désormais révolue. Depuis ce 1er décembre 2020, la nouvelle législation traitant les clauses abusives dans les relations B2B est désormais nettement plus stricte. Et c’est sans doute une bonne nouvelle pour les petites et moyennes entreprises…
En effet, grâce à cette nouvelle législation, entrée en vigueur début décembre, les petites et moyennes entreprises sont mieux protégées face aux grandes qui ont tendance à imposer leurs conditions. De manière plus générale, cette loi protège les entreprises contre les abus des autres entreprises. Les clauses abusives dans leurs contrats respectifs sont désormais nulles.
En effet, des conditions générales de vente peu claires, contenant des clauses abusives ou des contrats laissant place à l’interprétation, pourraient désormais se retourner contre l’entreprise. Depuis ce 1er décembre 2020 , les règles relatives aux clauses abusives, qui s’appliquaient jusqu’à ici uniquement aux consommateurs, s’étendront aussi – en partie – entre entreprises (relations B2B).
Pour quels contrats ?
Cette nouvelle législation B2B s’applique à toute relation contractuelle interentreprises. Elle concerne les contrats conclus, renouvelés ou modifiés à partir de cette date, et non aux contrats déjà entrés en vigueur précédemment.
Une clause abusive, c’est quoi ?
On parle de clause abusive lorsqu’elle crée un déséquilibre évident entre les droits et obligations des parties. C’est une clause qui va avantager uniquement ou démesurément l’une des parties prenantes.
Prenons un exemple concret cité par 1819.brussels : « Si le délai légal de garantie d’un produit défectueux dans un contrat de vente est de 2 ans mais qu’une clause envisage un délai inférieur, elle sera certainement jugée abusive et écartée par un juge. En revanche, le contrat ainsi que les autres clauses des conditions générales resteront d’application entre les parties. »
En plus de cette description « ouverte » de ce qui est abusif et de cette règle générale sur le déséquilibre manifeste entre droits et obligations des parties, il existe aussi désormais deux listes de clauses abusives : une noire et une grise.
Deux listes de clauses abusives
La liste noire reprend des clauses interdites. Il s’agit entre autres des clauses qui donnent à une partie le droit d’interpréter le contrat de façon unilatérale, ou de celles interdisant d’intenter un recours en cas de litige. Les clauses d’information et d’acceptation sont également incluses dans la liste noire.
La liste grise regroupe les clauses présumées abusives, mais dont l’entreprise peut éventuellement prouver qu’elles ne le sont pas eu égard aux circonstances et caractéristiques concrètes du contrat. Ces clauses sont admises si l’on peut expliquer pourquoi elles doivent figurer dans le contrat.
La liste grise reprend, par exemple, les clauses de prorogation et de renouvellement tacites, celles qui donnent à une entreprise le droit d’adapter les conditions contractuelles unilatéralement et sans raison valable, les clauses d’exonération, les clauses pénales disproportionnées et les clauses limitant les moyens de preuve utilisables.
Pour qui ?
La législation B2B s’adresse à toutes les entreprises. La règlementation s’applique donc à :
- toute personne physique qui exerce de manière indépendante une activité professionnelle (par exemple : une entreprise unipersonnelle, une société de gérance, un artiste) ;
- toute personne morale (tout type de société, donc également une ASBL ou une fondation, même si elle ne poursuit pas un objectif économique) ;
- toute autre organisation sans personnalité juridique (par exemple : une société civile).
Les règles relatives aux clauses abusives sont entrées en vigueur le 1er décembre 2020.
- Prudence : il est à l’heure actuelle impossible de savoir comment les tribunaux interpréteront à l’avenir concrètement ces nouvelles règles
- Passez vos conditions générales et contrats standards au crible à la recherche de clauses abusives.
- Faites d’une pierre deux coups en adaptant vos conditions autant en regard des règles applicables au B2B que B2C
- Jouez la carte de la transparence : faites connaitre vos conditions générales avant signature de contrat.
Les clauses de la liste noire
La ‘liste noire’ dans les relations B2B comprend les types de clauses déclarées d’office comme abusives et interdites. Elles ne tolèrent aucune marge d’appréciation. Si une de ces clauses se trouve dans le contrat, elle sera d’office nulle et écartée.
Sont abusives les clauses qui ont pour objet de :
- prévoir un engagement irrévocable de l’autre partie, alors que l’exécution des prestations de l’entreprise est soumise à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté (ex. : je livre la marchandise quand bon me semble)
- conférer à l’entreprise le droit unilatéral d’interpréter une quelconque clause du contrat ;
- en cas de conflit, faire renoncer l’autre partie à tout moyen de recours contre l’entreprise ;
- constater de manière irréfragable la connaissance ou l’adhésion de l’autre partie à des clauses dont elle n’a pas eu effectivement l’occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat.
Les clauses de la liste grise
La liste grise de clauses abusives est constituée de stipulations sur lesquelles pèse une forte présomption de caractère abusif. Toutefois, elles ne le sont pas toujours. C’est la raison pour laquelle, la présomption qui pèse sur ces clauses est simple, à charge pour la partie concernée d’apporter la preuve contraire.
Sont abusives les clauses qui ont pour objet de :
- autoriser l’entreprise à modifier unilatéralement sans raison valable le prix, les caractéristiques ou les conditions du contrat ;
- proroger ou renouveler tacitement un contrat à durée déterminée sans spécification d’un délai raisonnable de résiliation ;
- placer, sans contrepartie, le risque économique sur une partie alors que celui-ci incombe normalement à l’autre entreprise ou à une autre partie au contrat
- exclure ou limiter de façon inappropriée les droits légaux d’une partie, en cas de non-exécution totale ou partielle ou d’exécution défectueuse par l’autre entreprise d’une de ses obligations contractuelles ;
- (sans préjudice de l’article 1184 du Code civil) engager les parties sans spécification d’un délai raisonnable de résiliation ;
- libérer l’entreprise de sa responsabilité du fait de son dol, de sa faute grave ou de celle de ses préposés ou, sauf en cas de force majeure, du fait de toute inexécution des engagements essentiels qui font l’objet du contrat ;
- limiter les moyens de preuve que l’autre partie peut utiliser ; ou
- fixer des montants de dommages et intérêts réclamés en cas d’inexécution ou de retard dans l’exécution des obligations de l’autre partie, qui dépassent manifestement l’étendue du préjudice susceptible d’être subi par l’entreprise.