L’administration fiscale ayant, de manière générale, subi une importante restructuration interne en 2015 et 2016, l’on avait pu constater durant ces années une importante diminution du volume global des contrôles fiscaux, ce dont les contribuables ne se sont bien entendu pas plaints.
Tel n’est assurément pas le cas en 2017. En effet, un vent favorable nous a avisés de l’existence d’instructions ministérielles confidentielles ayant pour effet la tenue d’importantes opérations de contrôles fiscaux tous azimuts, ainsi que de l’existence d’opérations de contrôles ciblées touchant de
très nombreux contribuables. En voici les principaux axes.
Des contrôles nombreux et rigoureux
Sur un plan général, on ne peut que constater l’annonce et la tenue d’un volume important de contrôles fiscaux, portant sur les revenus afférents aux années 2014 et 2015, et pour lesquels les fonctionnaires taxateurs semblent avoir reçu des instructions tendant à l’application d’une tolérance
zéro en ce qui concerne les manquements constatés et l’application des amendes, notamment en raison de la constatation de manquements relatifs à l’application de la législation TVA.
Par ailleurs, de nombreuses opérations ciblées sont annoncées ou en cours. En voici les principales :
L’exploitation des données provenant de l’échange international d’informations entre
administrations fiscales
En 2017, l’échange automatique des informations entre administrations fiscales est devenu une réalité de terrain.
Il concerne l’ensemble des pays de l’Union européenne et de l’Espace Economique Européen (sauf la Suisse et l’Autriche, qui n’appliqueront le système d’échange automatique qu’à partie de 2018), ainsi que la quasi-totalité des pays de l’OCDE et nombres de pays que le commun des mortels considère encore comme des paradis fiscaux alors que ce n’en sont plus.
L’échange est automatique, de sorte que, sans rien devoir faire ou demander, l’administration fiscale belge reçoit de tout pays adhérent au système une information complète sur les avoirs mobiliers des résidents fiscaux belges dans ledit pays, notamment les revenus mobiliers (intérêts et dividendes), les plus-values sur actions, les boni de liquidation et surtout le solde des comptes, ce qui est bien entendu la porte ouverte à un questionnement sur l’origine des fonds.
Par ailleurs, l’existence de contrats d’assurance vie souscrits auprès de compagnies étrangères est aussi renseignée, de même que la détention d’immeubles à l’étranger. A titre d’exemple, l’Italie vient d’envoyer à la Belgique un relevé complet et exhaustif des immeubles que les résidents fiscaux belges possèdent en Italie.
L’exploitation de cette manne d’informations est bien entendu susceptible d’aboutir à d’importants redressements fiscaux en cas de constatation de non-déclaration de revenus ou d’avoirs mobiliers ou immobiliers, avec une rétroactivité pouvant remonter à 7 ans (10 ans en cas de fraude aux droits de
succession), d’importants accroissements d’impôts, des amendes, voire des suites pénales.
Une régularisation est possible, mais elle doit être spontanée, c’est-à-dire menée avant l’annonce – et a fortiori la tenue de tout contrôle.
Le refus de la déduction de factures de management non détaillées
Autre grande opération de contrôle : le refus de la déductibilité au titre de charges professionnelles, dans le chef de sociétés d’exploitation, de factures de management adressées par des sociétés, elles-mêmes administratrices ou gérantes de ces autres sociétés.
L’exigence de l’administration fiscale est la preuve de la réalité et du volume des prestations de management et, si cette preuve ne peut être rapportée, le contrôle aboutit au rejet pur et simple de la déduction dans le chef de la société ayant payé la facture.
Sur le plan des principes, la jurisprudence semble donner raison à l’administration, mais ses exigences en termes de preuve sont très discutables.
La traque aux montages immobiliers entre les dirigeants d’entreprises et leur société d’exploitation
ou de management.
Ici, il s’agit de la poursuite d’une opération de contrôle entamée précédemment, mais celle-ci prend d’autres formes.
L’accent est particulièrement mis sur le refus de déductibilité au titre de charges professionnelles dans le chef des sociétés des dépenses opérées pour un achat immobilier en vue de consentir à titre gratuit l’usage total ou partiel du bien à un dirigeant au titre de logement privé.
La jurisprudence rejette globalement la position de l’administration fiscale sur ce point, ce qui ne l’empêche pas de rejeter en masse la déductibilité de ce type de dépenses. Un conseil : défendez-vous bec et ongles.
Par ailleurs, on constate également, et c’est une nouveauté, l’existence de certains litiges où l’administration fiscale tente – totalement à tort selon nous – de considérer la reconstitution de la pleine propriété dans le chef du dirigeant en cas de fin d’usufruit ou de droit de superficie comme constituant l’attribution d’un avantage de toute nature taxable dans son chef. Ce qui aboutit à des bases de taxation, encore une fois très contestables, dont l’importance donne parfois le vertige.
Les contrôles HORECA et Blackbox
Enfin, nous serions incomplets si nous ne mentionnions pas une gigantesque opération de contrôle dans le secteur Horeca, visant à la fois le contrôle de la mise en service des blackbox, avec des amendes importantes en cas d’infraction (amendes dont la légalité vient d’être mise à mal par un arrêt très récent du Conseil d’Etat), et un contrôle ordinaire tendant au rejet de la comptabilité et à la rectification du chiffre d’affaires Isoc et TVA.
Là aussi, les considérations émises par certains contrôleurs sont souvent très éloignées de la réalité juridique et fiscale. Une seule conclusion s’impose donc : soyons vigilants, l’ennemi veille, mais soyons aussi durs dans la défense qu’il l’est dans l’attaque.
Source : Thierry LITANNIE